On considère classiquement ces sillons comme creusés lors des phases de décrue glaciaire, car l'étagement de leurs altitudes, de 350 à 460 m, les positionne très en dessous du niveau de la surface du glacier
würmien (1100 mètres sur la cuvette grenobloise).
Mais au-dessus de cet ensemble, nous pensons qu'il existe un ultime sillon rocheux, celui du ruisseau du
Bouteillard, particulièrement remarquable, car large de 600 mètres environ, ce qui en fait le plus important de tous les sillons rocheux que nous avons rencontés.
|
LEGENDE
1 = Combe Vallier 2 = Désert de l'Ecureuil 3 = Désert de Jean-Jacques Rousseau 4 = Le Bouteillard |
Entre les falaises qui le limitent latéralement, de la rive gauche du ruisseau du
Bouteillard jusqu'au flanc ouest du sommet 630 m, le fond du sillon est occupé par des terrains glaciaires.
Ce sillon du
Bouteillard est le plus élevé que l'on puisse rencontrer sur ce versant du
Vercors, car, plus haut, la pente du terrain s'accentue jusqu'à atteindre des valeurs bien supérieures à 21 %, valeur limite au-dessus de laquelle nous n'avons jamais observé de sillons.
L'emplacement de ce sillon rocheux a probablement été fixé par une faille sensiblement nord-sud, qui figure sur la carte géologique.
Mais ses dimensions inhabituelles (600 m de largeur par 40 m de profondeur au minimum), méritent que l'on s'y attarde.
Quel peut être, en effet, le mode d'érosion capable d'avoir creusé un pareil fossé ?
Ce n'est pas l'érosion torrentielle, ainsi que le montre sa quasi horizontalité et l'insignifiance du bassin d'alimentation.
Est-ce l'érosion par la glace ? Peut-être, encore que l'on ne voit pas bien pour quelle raison elle s'est exercée ici plus vigoureusement que pour tous les autres sillons rocheux.
Tout se passe comme si une rivière importante avait coulé longuement ici. Mais quelle rivière ?
Il nous semble possible de formuler - sous toutes réserves - l'hypothése suivante :
L'altitude de ce sillon du
Bouteillard (600 m environ) suggère la possibilité d'un creusement par les eaux d'écoulement du
lac du Trièves (qui coulaient à 780 m au
seuil des Cadorats, à 30 km plus à l'amont).
Voir à ce sujet
Les anciens lacs du Trièves
La riviére qui a creusé le sillon du
Bouteillard serait donc le cours
intraglaciaire du Drac, repoussé contre le Vercors par le glacier de l'Isère, après avoir reçu l'apport des eaux de la rive gauche du glacier de l'
Isère et de celles de la
Romanche.
Nous nous proposons de revenir sur cette question ultérieurement.
Mais dès à présent, nous remarquerons que, si cette hypothése se révélait exacte, il serait possible d'en déduire que les sillons rocheux - tout au moins certains d'entre eux - plus que par la glace, ont été creusés par les eaux latérales des glaciers.