LES ANCIENS LACS DU TRIEVES
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LE TRIEVES

Le Trièves est la partie la plus basse du bassin du Drac dont il abrite les affluents de la rive gauche, l'Ebron et la Vanne. Il est limité, à l'amont, par une arête descendue du Châtel ou Bonnet de Calvin en direction de La Mure, arête qui porte entre autres le Seuil de Laye et le Serre des Aires (voir les cartes détaillées à la page
Les anciens lacs du Beaumont et du Champsaur).






LE LAC WURMIEN DU TRIEVES

C'était, pendant la dernière glaciation, le plus important de tous les lacs du bassin du Drac.

On sait, à la suite de Guy Monjuvent, que les glaciers qui occupaient las vallées des affluents du Drac, moins vigoureux qu'au Riss, ne dépassaient guère le fond de la vallée principale.
De plus, le glacier de la Durance n'envoyait, par le col Bayard, qu'une maigre diffluence et non plus l'important flot de glace de la glaciation précédente.
Le glacier du Drac se cantonnait tout en haut de sa vallée et le Trièves était libre de glace.
Mais les eaux du Drac, parnenue à la hauteur de Sinard, venaient se heurter à un obstacle à premiére vue infranchissable : le front du glacier de l'Isère et sa moraine frontale.

En effet, après avoir parcouru le Grésivaudan, ce glacier, tournant à angle droit au-dessus de Grenoble, descendait la cluse de Voreppe.
Mais, comme emportée par son élan, une partie des glaces remontait la basse vallée du Drac jusqu'à Sinard et celle de son affluent la Gresse jusqu'à Saint-Paul-les-Monestier).
Entendons-nous bien cependant : le flot de glace remontait effectivement ces vallées, mais la surface du glacier, bien entendu, s'abaissait depuis Grenoble jusqu'à Sinard ou Saint-Paul-les-Monestier.
C'est donc ce front glaciaire qui, formant barrage, arrêtait les eaux du Drac, retenant ainsi le lac du Trièves.
Ne pouvant vaincre l'obstacle frontal que constituait le glacier de l'Isère, le lac se déversait, latéralement, par un point bas de l'arête qui le séparait de la vallée de la Gresse, le seuil des Cadorats.
Les eaux pénétraient alors latéralement sous la langue glaciaire du glacier de l'Isère qui remplissait cette vallée de la Gresse et s'évacuaient en profondeur, d'autant plus facilement qu'il s'agissait, non d'eaux de fonte glaciaires, mais d'eaux sortant d'un lac, où elles avaient été portées à une température supérieure à 0 degrés en été.

Que devenaient les eaux du Drac après avoir plongé sous le glacier qui remplissait la vallée de la Gresse ? Quelques éléments de réponse à la page Les sillons de Seyssinet-Pariset

Pour en savoir plus sur la circulation des eaux glaciaires

C'est donc ce seuil des Cadorats qui fixait à 770 m d'altitude le niveau du lac. Sur le versant ouest de ce seuil, les eaux issues du lac ont creusé un vallon, dans lequel la route nationale RN 75 décrit un virage accentué.
On peut toutefois s'étonner de la taille relativement modeste de ce vallon, dont la pente est pourtant soutenue et qui fut parcouru pendant des milliers d'années par une rivière importante telle que le Drac.
Il nous semble donc probable que le barrage formé par le glacier de l'Isère dans la vallée du Drac n'était pas totalement étanche et qu'une partie des eaux de cette rivière s'écoulait à travers la moraine frontale et la glace.
Dans cette hypothèse, le seuil des Cadorats aurait joué seulement le rôle d'un déversoir de sécurité, qui limitait effectivement le niveau du lac à la cote de 770 mètres.



Au fil des millénaires, les apports du Drac finirent par combler entièrement le lac, d'éléments grossiers (galets, graviers, sables) dans sa partie amont et d'argiles plus à l'aval. Ces argiles se déposaient sous forme de d'argile varvées - c'est-à-dire formées par l'empilage de minces feuillets superposés, chacun d'eux correspondant au dépôt d'une année - alors que sables et graviers le faisaient, à l'amont, sous forme de dépôts deltaïques.

Au début de son histoire, le lac du Trièves s'était d'ailleurs étendu jusqu'en amont du Beaumont. Puis le glacier de la Bonne était arrivé, barrant la vallée, coupant le lac en deux et créant ainsi, à l'amont, le lac du Beaumont, dont nous parlerons plus loin.

Après disparition des glaciers, la plus grande partie des dépôts fut emportée. Subsistent encore toutefois, toujours à une altitude proche de 770 m, plusieurs terrasses, à Saint-Jean d'Hérans et Villard Julien ainsi que les typiques argiles de Sinard.


ET QUE S'ETAIT-IL PASSE AU RISS ?

Au maximum du Riss la glace avait occupé la totalité du bassin du Trièves. Ce n'est qu'à la décrue des glaces que, le niveau des glaciers ayant fortement baissé, la situation s'est trouvée analogue à celle que nous venons de décrire pour le Würm. Il devait alors vraisemblablement exister un lac analogue au lac würmien, à une altitude peu différente.